Un bout de feuille négligemment déposé sur le pas
de la porte... Soit c’est une facture, soit c’est une facture !
D’un seul coup d’œil j’ai parcouru la feuille. Ce
n’est pas de la littérature, on le voit tout de suite. A force, mes yeux ont
développé des réflexes bien précis face à la douloureuse : un coup d’œil
en haut à gauche pour connaître l’émetteur du courrier : c’est bien la CIE* !
Et un coup d’œil en bas à droite…
- QUOI ???? (Stupeur)
C’est pas vrai ??
(Déception nerveuse)
Grrrrrrr !
Aaaarrrrgghhh !!! » (Cris de rage)
Constat : ma facture a doublé !
Je m’assoie pour décortiquer la note d’électricité et savoir là où
le bât blesse. Charabia dans chaque case du tableau : « index
ancien », « index nouveau », « coefficient de
lecture », « tranche »… Pfff! Ma facture a doublé, et je ne suis
pas d’accord !
Je décide de les appeler. J’ai droit à la musique d’accueil. Une
minute, deux minutes au bout du fil. Je m’accroche comme une teigne. Ca boue en
moi, je sens que je vais passer mes nerfs sur leur service client. Trois
minutes, quatre minutes, cinq minutes… Je commence à penser à ma facture de
téléphone. Je raccroche. Ils m’ont eu.
Je reviens à mes calculs. Je n’ai pourtant pas changé mes
habitudes de consommation ? Bon, ok, il fait chaud en ce moment, et la
climatisation tourne à fond, mais de là à doubler ma facture ?!
J’additionne, je soustrais, je trifouille les chiffres de chaque case… Je sens
que je vais devoir m'y rendre pour demander des explications. Et à ce moment
précis, un souvenir monstrueux me traversa l’esprit. J’en ai encore des
palpitations.
Flashback :
Une année, mes parents m’envoient dans les bureaux de la CIE pour
résoudre un problème concernant leur quittance. Nous avions reçu un rappel pour
non paiement de la précédente facture majorée d’une amende. Ce qui était faux
bien sûr et j’allais brandir toutes les preuves. Une fois sur les lieux, on me
fait comprendre que je devrais rencontrer la Directrice commerciale qui gère ce
type de problèmes, mais celle-ci n’était pas disponible. Je découvris plus tard
qu’elle prenait une pause sandwich-spaghetti-tomate (les connaisseurs
connaissent !) pendant près de trente minutes.
Dessin réalisé par A. Kelson 12 |
On m’oriente alors vers la caisse de paiement pour que ma
préoccupation soit prise en charge rapidement. (Je ne vois pas trop le rapport –
je ne veux pas payer, je veux régulariser ! - mais bon, j’y vais quand
même). Je me dirige vers cette fameuse caisse située sous un hangar en dehors
de l’établissement principal et qui reçoit par la même occasion une file
humaine kilométrique. Je m’avance et je sens tous les regards pointer vers moi.
Je me sens dévisagée et j’ai la désagréable impression de ne pas être la
bienvenue. Tout en faisant mine d'ignorer cette intimidation, je m’avance vers
le guichet :
-
Excusez moi, je veux
juste un renseignement, ça ne prendra que quelques secondes. Ne vous inquiétez
pas, je ne veux pas sauter le rang, je veux juste…
Je n’ai pas fini ma phrase. Erreur monumentale d’une vie !!
J’ai senti le ciel s’ouvrir sur ma tête et j’ai cru
voir Zeus en personne me gronder. Un tonnerre tonitruant de protestation s’abattit
sur moi. Je me suis retournée comme une guerrière pour affronter la horde en
face...
J’ai cru voir un troupeau de
bergers allemand lancés à mes trousses. La ligne humaine qui patientait depuis
des heures malgré elle a fait éclater sa rage. L’assaut était insoutenable.
J’ai sorti le drapeau blanc.
- Vous ne m’avez pas
comprise, je… » Peine perdue !
- ON S’EN FOUT !!!!
VIENS FAIRE LA QUEUE ICI ! TU VEUX NOUS DOUBLER ? VOLEUSE
LA !!!
Des yeux rouges de colère, des
visages brillant sous la chaleur fulminaient. J’ai détalé en moins de deux
secondes.
De retour dans le bâtiment
principal, la dame de l’accueil m’interpelle.
« Mademoiselle, vous
arrivez à temps, voici la Directrice Commerciale. Elle va vous recevoir »,
dit-elle en me présentant la responsable du service.
La dame me fît un grand sourire
tout en glissant dans une poubelle de bureau, un papier d’emballage tout plein
de gras. Elle avait un morceau de spaghetti posé sur la lèvre inférieure et un
bout de tomate coincé entre les dents. Elle m’a dit « On s’occupe de
vous ? ».
Elle n’avait pas remarqué que
derrière moi, une petite foule de musclés s’amassait. Ils étaient prêts à
ouvrir la porte. C’est sûr, ils veulent ma peau ! Je me retourne vers la
dame dans un élan de désespoir. La porte s’est ouverte. Crispée, j’ai fermé les
yeux. Il y a eu comme un silence glacial dans ma tête…
Je suis foutue !
La suite ici.
Légende
La
CIE* : Compagnie Ivoirienne d’Electricité
Article paru sur www.caric-actu.com
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